MR. A.J.   /  RÉMI CHARMASSON - ALAIN SOLER


(Label Durance / Absilone - Socadisc CS032019)
Enregistré, mixé et masterisé par Antony Soler à l’Atelier de Musiques Improvisées (04 Château-Arnoux).
Rémi Charmasson (guitare)
Alain Soler (guitare)



Guitaristes et jazzmen émérites, ancrés dans le Sud de la France, Rémi Charmasson et Alain Soler offrent avec « Mr. A.J. » un album à leur compagnon de route, le saxophoniste André Jaume ; le titre du CD faisant très certainement écho au fameux « Mr. P.C. » dédié par John Coltrane à Paul Chambers...
André Jaume avec lequel Charmasson et Soler ont cheminé pendant plus de trente ans, est un des précurseurs du Free Jazz en Europe (avec Barre Philips, Gunter Schuller et tant encore...). 


Toujours désireux de rencontrer l’autre pour nourrir son art musical, André Jaume a voyagé a travers le monde (Mexique, Chine, USA, Afrique, Indonésie...) accompagné des deux guitaristes, tantôt ensemble et parfois alternativement.
Ainsi les deux "frères d’Art-mes" (c’est ainsi qu’ils sont présentés dans le communiqué de presse et cela leur va bien) rendent un hommage chaleureux, délicat et virtuose (dans le bon sens du terme car toujours très hautement musical) à leur ami qui célébrera son quatre-vingtième anniversaire en 2020.


Le répertoire choisi et proposé ici est une collection faite de quatre compositions significatives de Jaume (Beguin, Gin Fizz, Heavy’s, Marratxi) ; deux compositions originales des guitaristes (Is it a French Song ? pour Charmasson et Blues des Communards pour Soler) ; Smile de Chaplin (en deux tonalités ici, très certainement pour dynamiser de façon tonale le morceau) ; River Chant de Jimmy Giuffre (avec lequel, on s’en souviendra, Jaume collabora à plusieurs reprises) ; Girl des Beatles, The Coaster de G. Moncur III, deux morceaux qu’André Jaume affectionne particulièrement ainsi que trois compositions signées Django Reinhardt (Anouman déclinée en deux splendides et singulières ballades qui ouvrent et terminent l’opus, Nuages dont l’enjeu à été relevé et sublimé ici et enfin Blues for Ike dont la version "fun", presque en "flat picking" dans l’accompagnement, en séduira sans aucun doute plus d’un).


Les expressions - bien distinctes - des deux protagonistes servent idéalement les prétextes choisis, tant dans l’interplay que dans la conduite de l’énergie à la fois "douce" mais efficiente dans sa charge émotionnelle et très musicale dans son développement. 
L’assise du tempo, tandis que les pièces s’enchaînent, est également remarquable tout autant que la précision des inflexions rythmiques et des débits de notes parfois endiablées !


Un hommage qui fait du bien dans le panel assez monochrome ou/et "tendance" du jazz hexagonal et qui renoue également avec la tradition des grands duos de guitare (Jim Hall et Pat Metheny ; Barney Kessel et Herb Hellis...).
Voici donc un superbe album de jazz guitaristique, réjouissant à bien des égards, accessible pour le grand public et pourtant sans concession (c’est là la marque d’une vraie réussite). 


Soulignons aussi le travail de l’ingénieur du son Antony Soler, qui réussit, aussi bien dans la prise de son que dans le mixage proposé, à traduire toutes les composantes à la fois électriques et acoustiques de la session.


« Mr. A.J. » ; un opus à faire tourner sans modération pour réchauffer en douceur l’hiver qui arrive !

Article mis en ligne le 12 février 2020 par Pierre-Jean Ulpat